Vichy Enchères

Un archet de violoncelle de Joseph Henry (Mirecourt, 1823 - Paris, 1870)

Un bel archet de violoncelle de Joseph Henry sera présenté à Vichy Enchères lors de la vente de prestige d’instruments du quatuor du 1er décembre 2022. Très recherchés et relativement rares, les archets de Joseph Henry (Mirecourt 1823 – Paris 1870) séduisent les grands musiciens et sont joués par de nombreux solistes de renommée internationale. La découverte d’un remarquable archet de violoncelle réalisé par Joseph Henry à l’époque de la maturité, vers 1855-1860, nous donne l’occasion de revenir sur l’œuvre de cette importante figure de l’âge d’or de l’archèterie française.


Apprentissage auprès de Chanot (à partir de 1837)

Joseph Henry est né à Mirecourt en 1823 et baigna tout de suite dans l’univers de la lutherie puisque son père, Didier Amable Henry, était lui-même luthier. Comme beaucoup de ses confrères, il effectua certainement un premier apprentissage à Mirecourt, observant et reproduisant les gestes des anciens, avant de gagner Paris. En ce qui le concerne, le départ à Paris fut précoce puisqu’il survint dès 1837, alors qu’il n’était âgé que de 14 ans. Installé dans la capitale, celui qui allait devenir un grand archetier intégra l’atelier d’un luthier, en l’occurrence celui de Georges Chanot qui, malgré une production essentiellement concentrée sur les violons, lui permit de se former à l’art de l’archeterie.

Joseph Henry réalisa ainsi chez Chanot, en collaboration avec les différents membres de l’atelier, ses premiers archets marqués “CHANOT”, telle que cette baguette de violoncelle faite pour Chanot, réalisée en modèle col de cygne sous l’influence des maîtres parisiens. Notons que les archets de violoncelle de Henry suivant un autre modèle que celui à col de cygne sont assez rares dans sa carrière, et que c’est seulement à la fin de sa vie qu’il arrondit le dessous des plaques de têtes.

Perfectionnement avec Peccatte (1845-1847)

Après ses débuts chez Chanot, Joseph Henry intégra l’atelier de Dominique Peccatte, au sein duquel il se perfectionna et développa un style plus personnel vers 1845. Avec Nicolas Maire, il est celui qui s’est le plus rapproché du style de Dominique Peccatte. La hausse de cet archet de violoncelle présente effectivement un dégorgement assez court très “peccattisant”.
De la même manière, on observe que suite à sa collaboration avec Peccatte, les têtes d’archets de Joseph Henry devinrent plus carrées et plates. Cependant, d’une manière générale, les têtes de Joseph Henry sont plus plates et carrées que celles de Peccatte et présentent des hausses plus courtes et trapues, avec un bouton plus épais et conique[1]. Les deux élèves les plus connus de Peccatte, Joseph Henry et Pierre Simon, s’associèrent par la suite. et héritèrent notamment de la technique de façonnage de la cambrure des archets de Peccatte, considérée par beaucoup comme une référence en matière d’équilibre et de résistance.


[1]  Jean-François Raffin, Bernard Millant, L’Archet, Paris, L’Archet Ed., 20

Archet de violoncelle de Joseph HENRY Instrument mis en vente par Vichy Enchères le 1er décembre 2022 © Christophe Darbelet
Archet de violoncelle de Joseph HENRY
Instrument mis en vente par Vichy Enchères le 1er décembre 2022
© Christophe Darbelet

Association avec Simon (1847-1851)

A l’occasion du retour de Dominique Peccatte à Mirecourt fin 1847, Joseph Henry et Pierre Simon décidèrent de s’associer. Après s’être accordés avec Peccatte pour récupérer son atelier – qui était déjà l’ancienne propriété de François Lupot II – débuta ainsi une courte collaboration entre Joseph Henry et Pierre Simon, qui devait durer jusqu’en 1851. “S’il est fréquent de lire que cette collaboration était vouée à l’échec en raison de la forte personnalité de ces deux archetiers, c’est oublier un facteur historique de taille : le percement de la rue de Rivoli. En effet, comme nous le rappellent les experts Sylvain Bigot et Yannick Le Canu, la fin de cette collaboration fut précipitée par la destruction de l’atelier programmée à début 1852.”

L’architecte Gabriel Davioud fut chargé de relever les façades des maisons démolies, ce qui nous permet aujourd’hui de conserver un plan d’élévation de l’ancien atelier de Lupot récupéré par Peccatte, puis vendu à Simon et Henry. Celui-ci se situait au 18 rue d’Angiviller, au nord de la Place du Louvre. Déclaré d’utilité publique, le percement de la rue de Rivoli laissant à Pierre Simon et Joseph Henry le loisir de choisir leur indépendance.
Durant cette courte période, Joseph Henry affirma son style et son modèle devint plus “puissant et généreux”, pour reprendre les termes de Bernard Millant et Jean-François Raffin (L’Archet, L’Archet Editions, 2000). Ce perfectionnement fut récompensé par une mention honorable à l’Exposition Nationale de Paris en 1849. La collaboration entre Henry et Simon livra aussi de beaux archets et les deux hommes remportèrent ensemble une mention honorable à l’Exposition universelle de Londres en 1851. De manière générale, on constate toutefois que le style de Joseph Henry est plus puissant et carré que celui de Simon, plus rond et féminin, et ce principalement en ce qui concerne la tête.

La maturité artistique (1851-1865)

Suite à la fin de sa collaboration avec Pierre Simon en 1851, Joseph Henry s’installa à son compte au 8 rue des Vieux-Augustins. Durant cette décennie, il réalisa certains de ses plus beaux archets et c’est probablement à cette époque qu’il travailla pour Jean-Baptiste Vuillaume, dont l’atelier était situé à quelques pas.
Ces années peuvent ainsi être considérées comme celles de la maturité artistique. En 1855, il obtint d’ailleurs une médaille de deuxième classe à l’Exposition universelle de Paris. Autour du milieu de la décennie, son modèle de tête devint plus arrondi, et ce de manière particulièrement significative sur les devants de têtes. Réalisé vers 1855-1860, l’archet de violoncelle de la vente du 1er décembre 2022 présente une tête à col de cygne particulièrement fine, au nez allongé et à l’arête dessinant une belle et élégante courbe.

C’est également à partir de 1855 que Joseph Henry livra de nombreux archets pour Gand Frères, dont certains très raffinés à hausses en écailles et argent.
Autour de 1855-1865, Joseph Henry était alors au sommet de sa carrière et produisait des archets, à l’image de celui de la vente du 1er décembre 2022, associant élégance et vigueur. Il termina sa carrière rue Pagevin et mourut à son domicile parisien, au 14 rue de la Jussienne, le 19 juillet 1870.

“Il nous laisse une importante production d’archets de très bonne et d’égale qualité. Les musiciens les recherchent beaucoup pour leur jeu et les apprécient, pour certains, autant que ceux de D. PECCATTE.”

Jean-François Raffin, Bernard Millant, L’Archet, Paris, L’Archet Ed., 2000

De très grande qualité, la production de Joseph Henry ne cesse de séduire et d’être reconnue internationalement par les musiciens professionnels. La vente du Vichy Enchères du 1er décembre 2022 offrira ainsi l’opportunité à l’un d’entre eux d’acquérir un remarquable modèle de la maturité de cet archetier talentueux dont on ne connaît aucun apprenti… 


A CELLO BOW BY JOSEPH HENRY (MIRECOURT, 1823 – PARIS, 1870)

A beautiful cello bow by Joseph Henry will be offered at auction at Vichy Enchères during the fine stringed instruments sale on 1 December 2022. The bows of Joseph Henry (Mirecourt 1823 – Paris 1870) are highly sought after and relatively rare, and are popular with great musicians and played by many internationally acclaimed soloists. The discovery of this remarkable cello bow made by Joseph Henry during his mature period, around 1855-1860, provides us with the opportunity to revisit the work of this important figure of the golden age of French bow making.


Apprenticeship with Chanot (from 1837)

Joseph Henry was born in Mirecourt in 1823 and was immediately immersed in the world of violin making since his father, Didier Amable Henry, was himself a violin maker. Like many of his peers, he probably completed an initial apprenticeship in Mirecourt, studying and perpetuating the techniques and craft of his elders, before moving to Paris in 1937 at the tender age of 14. He settled in the capital, and the future great bow maker joined the workshop of a violin maker, Georges Chanot, who mainly produced violins, but allowed him to train in the art of bow making.

It was therefore at Chanot, in collaboration with various members of the workshop, that Joseph Henry made his first bows stamped “CHANOT”, such as this cello stick made for Chanot, with a swan neck inspired by other Parisian masters of the time. It’s worth noting that cello bows by Henri that do not feature a swan neck are quite rare in his output, and that it was only at the end of his life that he rounded the underside of the head plates.

Perfectionnement avec Peccatte (1845-1847)

After his early career at Chanot, Joseph Henry joined Dominique Peccatte’s workshop, where he perfected his skills and developed a more personal style around 1845. Along with Nicolas Maire, he is the one who came closest to Dominique Peccatte’s style. The frog of this cello bow actually features a rather short and very Peccate-inspired throat.
Similarly, as a result of his collaboration with Peccatte, Joseph Henry’s bow heads became more square and flat. However, typically, the bows of Joseph Henry have heads that are flatter and squarer than those of Peccatte, and have shorter, more stubby frogs, with a thicker, tapered button[1]. The two best-known students of Peccatte, Joseph Henry and Pierre Simon, later joined forces and inherited, in particular, Pecatte’s technique for shaping the camber of the bows, considered by many as a reference, combining perfectly balance and resistance.


[1]  Jean-François Raffin, Bernard Millant, L’Archet, Paris, L’Archet Ed., 20

Archet de violoncelle de Joseph HENRY Instrument mis en vente par Vichy Enchères le 1er décembre 2022 © Christophe Darbelet
Archet de violoncelle de Joseph HENRY
Instrument mis en vente par Vichy Enchères le 1er décembre 2022
© Christophe Darbelet

The collaboration with Simon (1847-1851)

When Dominique Peccatte returned to Mirecourt at the end of 1847, Joseph Henry and Pierre Simon decided to join forces. After agreeing with Peccatte to take over his workshop – which was the former property of François Lupot II – a short collaboration between Joseph Henry and Pierre Simon ensued, and lasted until 1851. “It is common to read that this collaboration was doomed to failure because of the strong personality of these two bow makers, but this analysis overlooks a major historical fact: the creation of the rue de Rivoli. Indeed, as experts Sylvain Bigot and Yannick Le Canu, remind us, the destruction of the workshop scheduled for early 1852, required by the road works, played a major part in the end of the collaboration between the two makers.

The architect Gabriel Davioud was commissioned with taking records of the facades of the houses to be demolished, which allows us today to consult the elevation plan of the former Lupot workshop taken over by Peccatte, then sold to Simon and Henry. It was located at 18 rue d’Angiviller, north of the Place du Louvre. Declared of public interest, the construction of the rue de Rivoli effectively provided Pierre Simon and Joseph Henry the opportunity to go their separate ways.
During this short collaboration, Joseph Henry affirmed his style and his model became more “powerful and generous in proportions”, to use the terms of Bernard Millant and Jean-François Raffin (L’Archet, L’Archet Editions, 2000). This improvement was rewarded with an honourable mention at the Exposition Nationale de Paris in 1849. The collaboration between Henry and Simon also produced beautiful bows and the two men, as a collaborative, won an honourable mention at the Universal Exhibition in London in 1851. In general, the style of Joseph Henry is more powerful and square than that of Simon, which is rounder and more ‘feminine’, and this is primarily noticeable in the style of the head.

The mature period (1851-1865)

Following the end of his collaboration with Pierre Simon in 1851, Joseph Henry set up on his own at 8 rue des Vieux-Augustins. For a decade, he made some of his most beautiful bows there, and it was probably at this time that he worked for Jean-Baptiste Vuillaume, whose workshop was located only a few steps away.
These years can be considered as his mature period. In 1855, he also obtained a second class medal at the Universal Exhibition in Paris. Around the middle of the decade, the model for his heads became more rounded, in particular, and significantly, the front of the heads. The cello bow in the sale on 1 December 2022 was made around 1855-1860 and has a particularly fine swan neck head, with an elongated tip, and its sharp upper edge draws a beautiful and elegant curve.

It was also from 1855 that Joseph Henry produced many bows for Gand Frères, some of which were very refined indeed and featured tortoiseshell and silver frogs.
Autour de 1855-1865, Joseph Henry était alors au sommet de sa carrière et produisait des archets, à l’image de celui de la vente du 1er décembre 2022, associant élégance et vigueur. Il termina sa carrière rue Pagevin et mourut à son domicile parisien, au 14 rue de la Jussienne, le 19 juillet 1870.

“He leaves behind a large output of bows of consistently very good quality. They are sought after by musicians for their playing qualities, and, for some, as desirable as those of D. PECCATTE.”

Jean-François Raffin, Bernard Millant, L’Archet, Paris, L’Archet Ed., 2000

The very high quality of Joseph Henry’s output continues to attract internationally acclaimed musicians. The sale at Vichy Enchères on 1 December 2022 will offer the opportunity for one of them to acquire a remarkable example from the mature period of this talented bow maker, of whom no apprentice is known. 

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