C’est un voyage à travers trois siècles de facture de clavecins que vous propose Vichy Enchères le 9 novembre 2024. Le parcours débute avec l’épinette de Nicolas Blanchet (1676), témoin précieux de l’époque où le clavecin régnait en maître sur la musique européenne. Ce rare instrument, signé de l’un des plus grands facteurs parisiens, est le premier connu à avoir été réalisé par Nicolas Blanchet et marque le début d’une dynastie de luthiers parisiens ayant façonné l’histoire de la musique du XVIIIe siècle. Il est suivi par une épinette de 1778, réalisée par Pascal Taskin, digne successeur des Blanchet, à l’époque où la famille d’instruments atteint son apogée sous les doigts de compositeurs comme Jean-Philippe Rameau ou François Couperin. Ce chef-d’œuvre, probablement offert à l’occasion de la naissance du dauphin de France, combine tradition et innovation, comme en témoigne sa sœur jumelle conservée à Yale. Enfin, le virginal d’Alessandro Riva (1835) offre un émouvant et dernier regard sur les claviers à cordes pincées, juste avant qu’ils ne soient éclipsés par le piano. De l’atelier parisien de Blanchet et Taskin à celui de Riva en Italie, ces instruments témoignent du rôle majeur de ces luthiers dans l’histoire de la facture instrumentale. Réunis pour cette vente exceptionnelle, ils symbolisent à eux seuls l’évolution du goût, de la facture et des pratiques de jeu d’une famille d’instruments qui, sur plus de trois siècles, resplendit !
La famille Blanchet est l’une des plus éminentes dynasties de facteurs parisiens de claviers à cordes pincées des XVIIe et XVIIIe siècles. Sur trois générations, les membres de la famille perfectionnèrent les clavecins et, par ce biais, contribuèrent à l’évolution de la musique baroque.
Le terme de “clavecin” désigne à la fois un instrument précis – descendant du psaltérion – et l’ensemble des instruments à sautereaux. Pour rappel, l’épinette, semblable au clavecin, a seulement un chevalet sur la table d’harmonie, tandis que le virginal en a deux.
Le clavecin occupait une place centrale dans la musique, servant à la fois de soliste et d’accompagnement d’ensembles. Les plus grands virtuoses de l’époque, tels que François Couperin ou Jacques Duphly, composèrent des œuvres pour l’instrument, qui devint un symbole de la musique baroque.
Or, cette place du clavecin dans l’histoire de la musique doit beaucoup au travail des Blanchet (et à leurs suites, des Taskin), qui élevèrent leur conception et construction à un niveau de complexité et de perfection jamais égalé.
Le fondateur de la dynastie, Nicolas Blanchet est originaire de Reims, où il naquit vers 1660. Il déménage à Paris probablement pour réaliser son apprentissage. Vers 1686, il s’établit en tant que maître facteur, rue des Fossés-Saint-Germain, et ne tarde pas à se faire connaître parmi les facteurs parisiens. Il reçoit le titre officiel de “maître” au sein de la corporation des facteurs d’instruments en 1689[1].
Son fils, François-Etienne Blanchet (I), naquit vers 1695. Il le rejoint dans les années 1720 et, avec lui, participe au prestige de l’atelier familial – reconstruisant et adaptant notamment des instruments flamands pour les rendre conformes aux exigences du XVIIIe siècle français. En quelques années, le nom des Blanchet devient synonyme d’excellence à la française et l’atelier triple sa valeur.
François-Étienne Blanchet est d’ailleurs nommé facteur des clavecins de la cour de France, une position incluant l’entretien et la restauration des instruments de la collection royale. À sa mort en 1761, son fils François-Étienne (II) prend la relève, continuant à innover et à produire des clavecins jusqu’à sa propre mort en 1766[1].
Après la disparition des Blanchet, Pascal Taskin, un ancien apprenti et membre de la famille par alliance, reprend l’atelier et perpétue la tradition familiale, marquant la fin d’une époque et le début d’une nouvelle ère.
Mais revenons à l’homme à l’origine de cette lignée : Nicolas Blanchet. Issu d’une famille modeste, son père était marchand drapier. Il est probable qu’il ait fait son apprentissage à Paris dans l’atelier de Pierre de la Cousture, un maître faiseur de clavecins. Ce lien possible est renforcé par le fait que Blanchet épousa Marthe Bacquet en 1686, dont la famille pourrait être liée à celle de Pierre de la Cousture qui était marié à une dénommée Marie Bacquet.
En 1689, il devient officiellement maître facteur d’instruments, une étape décisive dans sa carrière. Il se construit rapidement une solide réputation de facteur de clavecins et attire une clientèle prestigieuse. Son travail comprend également le ravalement d’instruments flamands, tels que ceux de Ruckers ou Couchet – particulièrement prisés par la noblesse et les virtuoses de l’époque.
Témoignant de sa prospérité grandissante et de sa situation privilégiée, il investit, en 1701, 3.000 livres dans une rente sur le trésor royal[1]. En 1715, il est élu juré de la corporation des facteurs d’instruments, une position importante qui lui permet de jouer un rôle administratif dans la régulation de la profession. Il meurt le 10 avril 1731. A la mort de son épouse Marthe Bacquet en 1722, l’inventaire de l’atelier révèlera un atelier richement équipé, comprenant trois établis dont deux entièrement équipés – suggérant que le père et le fils travaillaient seuls[2].
[1] Boalch online https://boalch.org/instruments/makerprofile/64
[2] Hunt, 2000, p.69
Datée 1676 sur la première touche d’origine, cette épinette est en tous points exceptionnelle, que ce soit en raison de son ancienneté que de son importance historique – l’instrument se situant aux fondements de la facture d’instruments à claviers parisiens. Il s’agit en effet du plus ancien instrument connu de Blanchet, fabriqué alors qu’il n’avait guère plus de 16 ans. Cette épinette nous offre dès lors un précieux témoignage du savoir-faire naissant de Blanchet, et porte en elle les germes des évolutions techniques et esthétiques des siècles suivants.
“Compte tenu de la jeunesse de Blanchet lorsqu’il a fabriqué cet instrument – il avait environ 16 ans – on peut supposer qu’il s’agissait d’une pièce d’apprentissage de taille réduite, comme les commodes miniatures fabriquées par les apprentis ébénistes. Le chapiteau des sautereaux, dont l’original manque, sans doute portait selon l’usage un nom, peut-être celui de son maître.”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
La caisse, construite en noyer et en sapin, témoigne d’une fabrication soignée. La profondeur et les dimensions de l’instrument trahissent une adaptation au goût et aux exigences de jeu du XVIIIe siècle, puisque la caisse a été élargie de 14,3 mm sur la gauche, afin d’ajouter des notes. Le clavier est d’ailleurs particulièrement remarquable. Il est composé de touches en tilleul et en peuplier, avec des marches en ébène finement sculptées, ornées de deux traits incisés. Certaines touches ont conservé leur revêtement d’origine en os, tandis que d’autres ont été remplacées au cours des restaurations et peintes en blanc. Les touches numérotées témoignent des ajouts réalisés lors du ravalement, avec des numéros signalant les notes ajoutées (marquées OOO OO O). La touche numéro 1, correspondant au Si (B), était autrefois la note la plus grave de l’instrument, avant les extensions de l’octave. Elle porte plusieurs inscriptions, dont son numéro “I”, ainsi qu’un chiffre “676” (pour 1676) gravé à l’encre, sous une croix et quelques lettres encore visibles sous UV, que l’on peut lire “NCB”, et qui confirment l’origine de l’instrument. La complexité de cette inscription peu lisible explique que Dowd et Boalch aient lu la date de “1696” au lieu de “1676”.
“Le chiffre “7” est écrit en juxtaposant l’empattement de la croix et certains (DOWD et BOALCH) l’ont lu comme un “9”. La lettre “n”, endommagée, est semblable à celle du clavecin de 1693 signé Nicolas Blanchet. Cette épinette est répertoriée comme l’œuvre de Nicolas Blanchet, et serait donc la plus ancienne connue du facteur, encore adolescent.”
William DOWD, “The Surviving Instruments of the Blanchet Workshop” in: The Historical Harpsichord, vol. 1 ed. H. Schott, Pendragon Press, New York, 1984, pp. 30,31. Cette erreur est reproduite dans Boalch-Mould Online, entrée no. BMO-171, dans Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
Le chevalet est caractéristique de l’époque. Monté en onglet, il s’appuie sur une technique de construction couramment utilisée dans la fabrication des épinettes.
Cette pièce majeure de l’histoire de la lutherie a traversé les siècles, passant entre les mains expertes des spécialistes de clavecins Anthony Sidey et Frédéric Bal – ce dernier a d’ailleurs réalisé trois répliques de l’épinette attestant de son importance historique.
Les détails décoratifs de l’épinette sont particulièrement minutieux et dignes d’une commande prestigieuse. Le couvercle, en tilleul, est orné de peintures datant probablement de la fin du XVIIIe siècle. L’extérieur est noir, encadré de bandes de peinture imitant le bronze, tandis que l’intérieur est d’un rouge vif, rehaussé de moulures dorées. Les charnières en laiton, finement décorées, ajoutent une touche de raffinement à l’ensemble. Le couvercle fait partie du ravalement et témoigne des transformations apportées à l’instrument au cours des siècles.
La table d’harmonie, réalisée en sapin, est décorée à la détrempe de motifs floraux, typiques des peintures ornant les instruments de l’époque, encadrés de rinceaux bleu clair. Ces petites natures mortes aux fleurs évoquent la peinture française d’un Jean-Baptiste Monnoyer, François Desportes ou, après eux, Pierre-Joseph Redouté.
Contrairement à d’autres épinettes, celle-ci se distingue par son absence de rosace, une caractéristique rare et notable. Le chevalet et le sillet, tous deux en noyer mouluré dans le style italien, témoignent également du raffinement porté à l’instrument.
Cet instrument est le témoin d’une pratique courante à l’époque : l’usage domestique des épinettes. À la différence du clavecin, plus imposant et coûteux, l’épinette était plus petite et plus abordable, ce qui faisait d’elle l’instrument idéal pour la musique de chambre. Bien que le clavecin ait connu un plus grand succès en tant qu’instrument de concert, l’épinette a continué d’occuper une place importante dans les sphères musicales privées. L’épinette de Blanchet de 1676 en est un parfait exemple et symbolise cette transition entre les pratiques musicales de la Renaissance et celles de l’ère baroque.
Comme le souligne Christopher Clarke, expert et facteur d’instruments à claviers anciens, sa conception est conforme aux modèles illustrés dans l’ouvrage Harmonicorum Instrumentorum de Marin Mersenne datant de 1636, ce qui en fait un objet rare et représentatif des pratiques instrumentales de l’époque. Initialement, l’épinette de Blanchet comportait une octave basse courte (sol/si-do4) et un chevalet en onglet, avant d’être agrandie au XVIIIe siècle. Le ravalement, effectué à cette époque, a permis d’élargir l’étendue de l’instrument, témoignant ainsi de son usage prolongé et de l’intérêt constant pour ces instruments à travers les siècles.
L’épinette de Nicolas Blanchet se fait le reflet des pratiques musicales de l’époque, marquée par l’utilisation d’instruments à octave. Comme le souligne Christopher Clarke, ces instruments, couramment utilisés durant la Renaissance et le début du baroque, « avaient des tessitures décalées, dont certaines pouvaient cohabiter quasi-indépendamment dans la même boîte. Celles décalées à l’octave avaient deux fonctions : soit d’être jouées en solo, soit de renforcer ou éclaircir la sonorité des jeux à l’unisson. Au fil du XVIIIe c’est cette dernière utilisation qui finit par primer. » La restauration de cet instrument, en particulier le ravalement du XVIIIe siècle, lui a permis de conserver son esthétique d’origine tout en l’adaptant aux nouveaux goûts et besoins musicaux de l’époque. En somme, cette épinette de 1676 cristallise non seulement le savoir-faire de Nicolas Blanchet dès son plus jeune âge, mais elle illustre aussi la continuité et l’évolution des instruments à clavier à travers les siècles. Son importance historique réside ainsi dans le témoignage qu’elle offre de cette période de transition entre les traditions de la Renaissance et les innovations du XVIIIe siècle, ce qui en fait un objet remarquable à plus d’un titre.
“Les deux épinettes [de la vente Vichy Enchères du 9 novembre 2024] sont toutes deux à l’octave qui, à un siècle d’intervalle, illustrent les années de gloire d’une seule dynastie d’ateliers parisiens, représentée ici à son début par Nicolas Blanchet (vers 1760-1731) par le plus ancien instrument connu de lui, daté de 1676 sur sa première touche d’origine. Le second instrument fut réalisé en 1778 par son célèbre successeur, Pascal Taskin (1723-1793)”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
Le lien entre Nicolas Blanchet et Pascal Taskin s’établit à travers la transmission de l’atelier entre les deux familles. Pascal Joseph Taskin rejoint en effet l’atelier de François-Étienne Blanchet II, le petit-fils de Nicolas Blanchet, et se forme auprès de lui. Cette connexion entre les deux familles s’intensifie lorsque Joseph Taskin épouse la veuve de François-Étienne Blanchet, Marie-Geneviève Gobin, en 1766, devenant ainsi le successeur direct de la famille Blanchet – héritant de l’atelier et du titre de facteur de clavecins du roi[1].
Bien qu’ayant été un facteur innovant, Taskin resta profondément respectueux des méthodes et des traditions établies par les Blanchet. Il continua de pratiquer le ravalement des anciens clavecins flamands, tout en introduisant des améliorations techniques. Le passage de la direction de l’atelier des Blanchet à Taskin est ainsi une transition naturelle, assurant la pérennité du savoir-faire parisien, tout en l’enrichissant.
Pascal Taskin, né le 2 juillet 1723 à Theux, dans la principauté de Liège, est sans doute le membre le plus célèbre de la famille Taskin. Fils d’un modeste menuisier, il débute sa carrière à Paris, en tant qu’apprenti de François-Étienne Blanchet. En 1766, il est admis comme maître de la guilde des facteurs d’instruments à clavier. Il se distingue rapidement par sa capacité à rénover et transformer des clavecins anciens, comme le faisaient les Blanchet. Le Museum of Fine Arts de Boston conserve l’un de ces instruments, un clavecin de Joseph Joannes Couchet réalisé à Anvers en 1680, et modifié par François-Etienne Blanchet et Pascal Taskin, à Paris, en 1758 et 1781[1].
L’une des principales innovations de Pascal Joseph Taskin est l’introduction des plectres en peau, ou « clavecin à buffle », qui adoucissent la sonorité et apportent une nouvelle expressivité à l’instrument.
Ce développement a contribué à renforcer la réputation de Taskin, lui permettant de devenir l’un des facteurs d’instruments les plus recherchés de la Cour. L’atelier de Taskin, situé rue de la Verrerie[1] à Paris, est devenu un centre d’innovation et de production de clavecins de haute qualité.
Taskin a également contribué à la transition vers le pianoforte. En 1788, il présente un modèle de piano à l’Académie des sciences, démontrant son intérêt pour les innovations. En plus de ses talents de facteur, Taskin est également un excellent gestionnaire. Il parvient à conserver les clients prestigieux des Blanchet tout en en attirant de nouveaux, tels que des membres de la cour royale et des musiciens renommés.
À sa mort en 1793, l’atelier est repris par son neveu, Pascal Joseph Taskin (II). Ce dernier a vécu et travaillé avec son oncle jusqu’en 1777, avant d’ouvrir son atelier à Versailles et de reprendre quelques-unes des responsabilités de facteur de la Cour – charge qui lui fut entièrement dévolue en 1793. Outre des clavecins, il fabriquait également des pianos. Le fils de Pascal Joseph Taskin (II), Henri-Joseph Taskin, poursuivit quant à lui une carrière dans la musique en tant que professeur de piano[1] et fut le gendre du claveciniste Armand-Louis Couperin (le neveu de François Couperin).
L’épinette fabriquée par Pascal Taskin en 1778 est un chef-d’œuvre de la facture instrumentale, à la fois par sa virtuosité technique, son raffinement esthétique et son importance historique.
Cet instrument, construit selon les traditions héritées de la famille Blanchet, représente l’apogée du savoir-faire français en matière de facture de claviers à sautereaux à la veille de la Révolution française.
Taskin reprend les techniques de fabrication des épinettes développées par les Blanchet tout en y apportant des améliorations notables. La mécanique de l’instrument, bien que semblable à celle des clavecins de la même époque, est ainsi optimisée pour offrir une meilleure réactivité au jeu du musicien.
L’épinette de 1778 est construite avec des matériaux de haute qualité, notamment des bois précieux comme le noyer et l’ébène – lui conférant robustesse et élégance. L’importance historique de cet instrument ne se limite pas à ses qualités techniques. Tout comme l’instrument de Blanchet, l’épinette de Taskin est un témoignage de l’évolution des goûts musicaux de son époque. À la fin du XVIIIème siècle, la musique pour claviers à cordes pincées devient de plus en plus estimée, et des compositeurs comme Joseph Haydn et Wolfgang Amadeus Mozart développent le répertoire en composant pour l’instrument. L’épinette de 1778, avec ses innovations techniques, s’inscrit précisément dans ce mouvement de recherche d’une plus grande sensibilité musicale.
Conçue à Paris, cette épinette se distingue par sa caisse trapézoïdale aux éclisses incurvées vers le clavier, montée sur des pieds fuselés et cannelés dans le goût typiquement Louis XVI, lui donnant une allure à la fois élégante et robuste. L’instrument dispose d’une étendue notable de 62 notes (de E à f4), lui permettant de jouer quelques pièces modernes avec le E grave. Son authenticité est attestée par plusieurs éléments essentiels. Tout d’abord, l’inscription gravée derrière les touches, en lettres rouges majuscules, porte la mention : « FAIT PAR PASCAL TASKIN A PARIS 1788 », confirmant l’origine et la datation de l’instrument. De plus, la table d’harmonie est marquée d’un monogramme « PT 1778 », entouré d’une couronne de fleurs, renforçant ainsi la signature du maître luthier. Un autre signe d’authenticité se trouve sur la touche Mi2, où l’inscription « PASCAL TASKIN » est marquée au fer, accompagnée de l’année « 1778 » et du chiffre « I », typique des marquages utilisés par l’atelier Taskin pour l’identification des touches et des composants.
L’étiquette imprimée à l’intérieur de l’échine, à l’arrière de l’instrument, fournit une autre preuve irréfutable de son origine. Elle précise : « PASCAL TASKIN, Facteur de Clavessins & Garde des Instrumens de Musique du Roi, Eleve et Successeur de M. BLANCHET, rue de la Verrerie, vis-à-vis S. Merry. A PARIS. » Cette inscription confirme non seulement la paternité de Taskin, mais également son statut de facteur officiel des instruments de musique du roi – héritier de Blanchet. L’instrument porte également la marque d’une révision effectuée par son neveu, Pascal Joseph Taskin (II), en 1795, comme en témoigne l’inscription manuscrite située derrière le couteau : « remplumée et redrapée par Pascal Taskin à Versailles ce 12 août 1795 ». Ce fait historique témoigne de la pérennité de l’atelier et du soin qui fut porté à cet instrument exceptionnel au sein de la famille Taskin.
Le haut degré de raffinement du décor de l’instrument évoque une provenance de premier ordre. En effet, cette épinette est l’une des plus précieuses réalisées par Pascal Taskin. Or, en raison de son titre de facteur du roi, il est possible que l’instrument ait été réalisé pour un membre de la Cour.
L’une des hypothèses les plus intéressantes repose sur la peinture du couvercle, qui pourrait symboliser la naissance du premier enfant de Louis XVI et de Marie-Antoinette, Marie-Thérèse, née le 19 décembre 1778 – c’est-à-dire l’année de réalisation de l’épinette.
Toutefois, malgré cette correspondance historique, il est difficile d’accréditer une telle hypothèse. D’abord, parce que la peinture a été réalisée a posteriori, sur le vernis original, et non pas au moment de la fabrication de l’épinette. Ensuite, parce que la figure du bébé a, à en juger par ses attributs, davantage l’air d’un garçon… Enfin, parce que les allégories de naissances royales concernaient principalement les garçons – seuls héritiers au trône.
La naissance de Marie-Thérèse, si elle a bien été célébrée dans les arts, reste picturalement beaucoup plus discrète que celle de son frère, le dauphin Louis-Joseph de France – premier héritier du trône de France – qui naquit quelques années après la fabrication de l’épinette : le 22 octobre 1781.
Cet événement historique majeur, qui assurait la filiation de la branche légitime de la maison de Bourbon, correspond donc chronologiquement mieux à la réalisation de la peinture du couvercle de l’épinette. Un examen réalisé sous rayons X (par les conservateurs de Yale University) a permis de s’assurer qu’il n’y avait rien qu’un vernis en dessous de la peinture du couvercle. L’instrument avait ainsi, à l’origine, un couvercle verni sans représentation figurative, qui fut probablement recouvert d’une peinture célébrant la naissance du dauphin. Cette hypothèse est renforcée par le titre de facteur du roi de Taskin, laissant supposer un travail pour un membre gravitant autour du monarque et désireux d’offrir un présent à son souverain.
Outre cette remarquable peinture du couvercle, l’instrument est entièrement recouvert de décors attestant d’une grande minutie, caractéristiques de la vogue picturale de l’époque. La caisse en tilleul est ornée d’un vernis d’un ton ivoire légèrement verdâtre, à l’intérieur comme à l’extérieur, souligné par des motifs dorés à la feuille. À l’intérieur, des décorations minutieuses présentent des branches de roses et de bleuets, tandis que le pourtour du clavier est embelli par des guirlandes de fleurs et des trophées musicaux peints avec une grande précision, dans le goût de peintres tels que Jean-Baptiste Huet ou Henri Sallembier. Ces motifs iconographiques sont chargés de symboles typiques des décors ornant les claviers. Toutefois, ils se singularisent ici par leur foisonnement et leur extrême minutie – trahissant la main d’un peintre assuré – soutenant l’hypothèse d’une noble provenance.
L’instrument devait être particulièrement important puisqu’il a été construit en même temps qu’un modèle jumeau, aujourd’hui conservé dans les collections de Yale University. Cette autre épinette, également réalisée en 1778, présente sur le couvercle un paysage animalier. Nous ne savons pas si, tout comme le modèle de la vente Vichy Enchères du 9 novembre 2024, cette peinture a été réalisée sur un vernis sous-jacent. Ces deux épinettes jumelles ont été réunies durant plusieurs années au sein des collections de la Yale University, comme on en trouve encore aujourd’hui la trace sur le site du musée. Elle avait alors subi une restauration exemplaire en 1996, pour être remise en état de jeu, par MM. Rutkowski et Robinette, conservateurs des collections d’instruments de musique de Yale University, qui avaient alors pu comparer cet instrument et son jumeau. Leur rapport de restauration accompagne l’instrument de la vente.
Le virginal d’Alessandro Riva, fabriqué vers 1835 à Bergame, est un instrument rare et précieux qui témoigne du savoir-faire de ce facteur peu connu et des derniers soubresauts de la facture de claviers à sautereaux.
Riva, dont l’existence connue s’étend de 1803 à 1868, était un facteur d’instruments respecté, et ce virginal, à la fois simple dans sa conception et minutieusement élaboré, illustre parfaitement son savoir-faire. D’une étendue de 54 notes (C/E-a3), il présente une caisse rectangulaire en noyer massif, montée sur quatre pieds rectangulaires en fuseau qui se vissent dans des blocs sous l’instrument, offrant stabilité et élégance. Le bois de noyer utilisé pour la caisse et le couvercle, ainsi que le sapin du fond, attestent d’un choix de matériaux de qualité, typiques des instruments de l’époque, et assurent une résonance acoustique riche.
Le clavier, réalisé en sapin, se distingue par ses marches plaquées en ébène et ses dièses en bois fruitier teinté et plaqué en os – des matériaux passés de mode à l’époque mais hérités d’un savoir-faire ancien. A contrario, les dimensions du clavier sont plutôt modernes puisque les touches ont les proportions de celles d’un piano.
Les mécanismes internes, tels que les sautereaux en poirier et les languettes en érable, démontrent une ingénierie fine, avec des ressorts en acier et des becs en cuir dur, soigneusement calibrés (3,4 mm de largeur et 1,65 mm d’épaisseur). Ces caractéristiques révèlent une simplicité de conception associée à une précision d’exécution, typique du travail de Riva. Notons enfin que l’instrument ne possède pas d’étouffoir ce qui, comme nous le rappelle Christopher Clarke, fait écho à l’esthétique des piano-fortes « pantalon » du milieu du XVIIIe siècle. En effet, hormis ces modèles, les claviers avaient tous des étouffoirs.
“L’authenticité du virginal est confirmée par la présence d’une étiquette manuscrite, soigneusement insérée derrière une mince vitre d’origine. Bien que l’étiquette actuelle remplace celle d’origine, la documentation disponible et les comparaisons avec d’autres instruments signés par Riva, notamment celui du Grassi Museum de Leipzig, ne laissent aucun doute quant à son authenticité.”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
L’épinette de Nicolas Blanchet de 1676, celle de Pascal Taskin de 1778 et le virginal d’Alessandro Riva, réalisé vers 1835, offrent un exceptionnel panorama de l’évolution des claviers à cordes pincées sur trois siècles. Ces instruments témoignent de l’évolution des techniques de fabrication et des pratiques musicales, tout en reflétant les tendances sociales et culturelles de leur époque. L’épinette de 1676, attribuée à Nicolas Blanchet, est le plus ancien instrument connu de ce facteur, et symbolise le début d’un savoir-faire parisien de prestige en matière de lutherie de clavecins. Sa forme et sa taille sont conformes au modèle de l’épinette illustré dans l’Harmonicorum Instrumentorum de Marin Mersenne de 1636, et son registre à l’octave, dit « de 4 pieds », était courant dans les clavecins anciens. Toutefois, à la différence des clavecins pour lesquels il s’agissait d’un registre parmi d’autres, c’est ici tout l’instrument qui est à l’octave.
L’épinette de Pascal Taskin de 1778, construite environ un siècle après celle de Blanchet, marque l’apogée de ce même atelier parisien. Taskin, élève et successeur de François-Étienne Blanchet (petit-fils de Nicolas), perpétue la tradition tout en apportant des améliorations techniques et esthétiques remarquables. Cette épinette, richement ornée, reflète la vogue de ces instruments au sein de l’élite de l’époque. L’étiquette à l’intérieur de l’instrument, qui l’identifie comme « Eleve & Successeur de M. BLANCHET », et les réparations effectuées en 1795 par le neveu de Taskin, soulignent la continuité de cette lignée de facteurs. Conçu en double (sa sœur jumelle étant conservée à Yale), ce modèle était donc particulièrement important et a pu être offert au monarque à l’occasion de la naissance du dauphin.
Enfin, le virginal d’Alessandro Riva, réalisé vers 1835, illustre une autre tradition – cette fois-ci italienne – et vient refermer la page de l’ère des claviers à cordes pinçées.
En effet, Riva est le dernier facteur à avoir travaillé dans le respect du savoir-faire traditionnel. Ce virginal, bien que construit au XIXe siècle, perpétue ainsi des caractéristiques propres aux pratiques plus anciennes, notamment en ce qui concerne l’étendue d’octave courte (C/E dans les basses), ou encore le montage avec des fines cordes en fer et en laiton, sans étouffoir. À une époque où les pianos devenaient de plus en plus imposants et complexes, les virginals de Riva offraient une alternative plus modeste et discrète, adaptée aux intérieurs privés et à un usage domestique.
Tous les trois réunis, ces instruments illustrent l’évolution des pratiques musicales et de la facture des claviers à cordes pincées, tout en soulignant la transition entre la splendeur des épinettes des XVIIe et XVIIIe siècles, à l’élégante sobriété des derniers modèles réalisés. Ils représentent à la fois des jalons techniques et des témoignages culturels de cette riche histoire des clavecins, avant qu’ils ne soient supplantés par le piano…
Vichy Enchères is taking you on a journey through three centuries of harpsichord making for its 9 November 2024 sale. This journey begins with Nicolas Blanchet’s spinet (1676), an important witness to an era when the harpsichord reigned supreme in European music. This rare instrument by Nicolas Blanchet, one of the greatest Parisian makers, is the earliest known by this maker and represents the beginning of a dynasty of Parisian makers who shaped the history of music in the 18th century. It is followed by a 1778 spinet, made by Pascal Taskin, a worthy successor to the Blanchets, at a time when this family of instruments reached its peak at the hands of composers such as Jean-Philippe Rameau and François Couperin. This masterpiece, probably presented on the occasion of the birth of the Dauphin of France, combines tradition and innovation, as evidenced by its twin preserved at Yale University. Finally, the virginal by Alessandro Riva (1835) provides a moving and last look at plucked keyboards, just before they were superseded by the piano. These instruments, from the Parisian workshop of Blanchet and Taskin and that of Riva in Italy, attest to the major role these makers played in the history of instrument making. They are brought together for this exceptional sale, and they crystalise the evolution of taste, craftsmanship and playing practices of a family of instruments that shone for over three centuries.
The Blanchet family is one of the foremost dynasties of Parisian plucked keyboard instrument makers in the 17th and 18th centuries. Over three generations, its family members perfected the harpsichords and, in doing so, contributed to the evolution of Baroque music.
The term “harpsichord” refers to both a specific instrument – a descendant of the psaltery – and all the instruments with jacks. As a reminder, the spinet, which is similar to the harpsichord, has only one bridge on the soundboard, while the virginal has two.
The harpsichord used to occupy a central place in music, serving both as a soloist and an accompaniment instrument for ensembles. The greatest virtuosos of the time, such as François Couperin or Jacques Duphly, composed works for the instrument, which became a symbol of Baroque music.
However, the place of the harpsichord in the history of music owes much to the work of the Blanchets (and their successors, the Taskins), who elevated their design and construction to a level of complexity and perfection never equalled.
The founder of the dynasty, Nicolas Blanchet, was born in Reims around 1660. He probably moved to Paris to complete his apprenticeship. Around 1686, he established himself as a master instrument maker on Rue des Fossés-Saint-Germain, and quickly became known among Parisian instrument makers. He received the official title of “master” by the corporation of instrument makers in 1689[1].
His son, François-Etienne Blanchet (I), was born around 1695. He joined him in the 1720s and, alongside him, contributed to the prestige of the family workshop – in particular by rebuilding and adapting Flemish instruments so they would conform to the requirements of French 18th century music. In a few years, the Blanchet name became synonymous with French excellence and the workshop’s turnover tripled.
In addition, François-Étienne Blanchet was appointed harpsichord maker to the French court, a position that involved maintaining and restoring instruments in the royal collection. When he died in 1761, his son François-Étienne (II) took over, continuing to innovate and produce harpsichords until his own death in 1766[1].
After the end of the Blanchet dynasty, Pascal Taskin, a former apprentice and family member by marriage, took over the workshop and perpetuated the family tradition, which marked the end of an era and the beginning of a new one.
Let us return to the first Blanchet, Nicolas. He came from a modest family, his father being a draper. It is likely that he did his apprenticeship in Paris in the workshop of Pierre de la Cousture, a master harpsichord maker. This theory is all the more likely as Blanchet married in 1686 Marthe Bacquet, whose family could be related to that of Pierre de la Cousture, as he was married to a woman named Marie Bacquet.
In 1689, he officially became a master instrument maker, which was a decisive step in his career. He quickly built up a solid reputation as a harpsichord maker and attracted a prestigious clientele. His work also included the restoration of Flemish instruments, such as those by Ruckers or Couchet, which were particularly prized by the nobility and virtuosos of the time.
As a testament to his growing success and privileged position, in 1701 he invested 3,000 pounds in a royal treasury bond[1].In 1715, he was elected juror of the corporation of instrument makers, an important position that allowed him to play an administrative role in regulating the profession. He died on 10 April 1731. When his wife Marthe Bacquet died in 1722, the workshop inventory revealed an extensive workshop, including three workbenches, two of which were fully equipped – suggesting that the father and son worked separately [2].
[1] Boalch online https://boalch.org/instruments/makerprofile/64
[2] Hunt, 2000, p.69
This spinet, dated 1676 on the first original key, is exceptional in many ways, because of both its age and historical importance, and was made at the time Parisian keyboard instrument making was first established. It is in fact Blanchet’s earliest known instrument, made when he was barely 16 years old. This spinet therefore provides us a unique testimony of Blanchet’s early craftsmanship, and carries within it the seeds of the technical and visual developments to come over the following centuries.
“Considering Blanchet’s age when he made this instrument – he was around 16 years old – it is safe to assume it was a small-scale apprenticeship piece, like the miniature chests of drawers made by apprentice cabinetmakers. The original jackrail, which is missing, would have featured, as customary, a name, perhaps that of his master.”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
The case, made from walnut and fir, shows attention to detail. The depth and dimensions of the instrument indicate that the instrument was modified to suit the taste and playing requirements in the 18th century, since the case was widened by 14.3mm on the left, in order to add notes. The keyboard is also remarkable. It is composed of keys in lime and poplar, with finely carved ebony steps, decorated with two incised lines. Some keys have retained their original bone cover, while others have been fitted with replacements during the restorations and painted white. The numbered keys are clues to the additions made during the restoration, with numbers indicating the notes added (marked OOO OO O). Key number 1, corresponding to B, was originally the lowest note on the instrument, before the octave extensions. It bears several inscriptions, including its number “I”, as well as the number “676” (for 1676) inscribed in ink, under a cross and some letters still visible under UV light, which read “NCB”, and which confirm the instrument’s maker. The complexity of this barely legible inscription explains why Dowd and Boalch read the date as 1696 instead of 1676.
“The number 7 is written by juxtaposing the serif of the cross, and some (DOWD and BOALCH) read it as a 9. The letter n, which shows signs of damage, is similar to that of the 1693 harpsichord by Nicolas Blanchet. This spinet is listed as the work of Nicolas Blanchet, which makes it the earliest known example by this maker, made while he was still a teenager.”
William DOWD, “The Surviving Instruments of the Blanchet Workshop” in: The Historical Harpsichord, vol. 1 ed. H. Schott, Pendragon Press, New York, 1984, pp. 30, 31. This error is reproduced in Boalch-Mould Online, entry no. BMO-171, in Christopher Clarke, Donzy le National, 16 September 2024
The bridge is typical of the period. It is mounted in a mitre, and follows a construction technique commonly used in the manufacture of spinets.
This important instrument in the history of harpsichord making has survived for centuries, passing through the expert hands of harpsichord specialists Anthony Sidey and Frédéric Bal, the latter making three copies of the spinet, which attests to its historical importance.
The decorative details of the spinet are particularly impressive and worthy of a prestigious commission. The lid, made of linden, is decorated with paintings probably dating from the end of the 18th century. The exterior is black, framed by bands of paint imitating bronze, while the interior is bright red and elevated by gilded mouldings. The finely decorated brass hinges add a touch of refinement to its general appearance. The lid was replaced as part of the instrument’s restoration and bears witness to the transformations made to the instrument over the centuries.
The soundboard, made of fir, is decorated with tempera paint floral motifs, typical of those adorning instruments of the time, framed by light blue scrolls. These small still-lives with flowers are reminiscent of French painters Jean-Baptiste Monnoyer, François Desportes and, later, Pierre-Joseph Redouté.
This spinet is also notable for not having a rosette, which was rare for this type of instrument. The bridge and nut, both in walnut moulded in the Italian style, also contribute to the high level of refinement of the instrument.
This instrument is a witness to a common practice at the time: the domestic use of spinets. Unlike the harpsichord, which was more voluminous and expensive, the spinet was smaller and more affordable, which made it the ideal instrument for chamber music. Although the harpsichord enjoyed greater success as a concert instrument, the spinet continued to occupy an important place in private musical circles. Blanchet’s 1676 spinet perfectly illustrates this and it symbolizes this transition between the musical practices of the Renaissance and those of the Baroque era.
As Christopher Clarke, expert and maker of early keyboards, points out, its design is in keeping with the examples illustrated in Marin Mersenne’s 1636 book Harmonicorum Instrumentorum, making it a rare artefact representative of the instrumental practices of the time. Originally, Blanchet’s spinet had a short bass octave (G/B-C4) and a mitered bridge, before it was enlarged in the 18th century. This conversion had for main purpose to extend the instrument’s range, thus attesting to its prolonged use and the continued interest in these instruments over the centuries.
Nicolas Blanchet’s spinet reflects the musical practices of the time, in particular the use of octave instruments. As Christopher Clarke points out, these instruments, commonly used during the Renaissance and early Baroque, « had staggered tessituras, some of which could coexist almost independently in the same instrument case. Those that were staggered by an octave had two functions: either to be played solo, or to reinforce or brighten the sound of unison playing. Over the course of the 18th century, it was this latter use that prevailed. » The restoration of this instrument, in particular the 18th-century conversion, was carried out so as to preserve its original appearance while adapting it to the new tastes and musical needs of the time. In short, this 1676 spinet not only crystallizes Nicolas Blanchet’s craftsmanship from a very young age, but also illustrates the continuity and evolution of keyboard instruments over the centuries. Its historical importance thus lies in the testimony it offers regarding this period of transition between the traditions of the Renaissance and the innovations of the 18th century, making it a remarkable artefact in more than one way.
“The two spinets [in the Vichy Enchères sale of 9 November 2024] are both in octave, and due to being one century apart in their making, span the golden age of a continuous dynasty of Parisian workshops, whose origins are represented here by the earliest known instrument by Nicolas Blanchet (around 1760-1731), which is dated 1676 on its first original key. The other instrument was made in 1778 by his famous successor, Pascal Taskin (1723-1793).”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
Nicolas Blanchet and Pascal Taskin are connected due to the Blanchet workshop being passed on to the Taskin family. Pascal Joseph Taskin joined the workshop of François-Étienne Blanchet II, Nicolas Blanchet’s grandson, and trained with him. The ties between the two families were further reinforced when Joseph Taskin married François-Étienne Blanchet’s widow, Marie-Geneviève Gobin, in 1766, thus becoming the direct successor of the Blanchet family, inheriting the workshop and the title of harpsichord maker to the king[1].
Although he was an innovative maker, Taskin remained very faithful to the methods and traditions established by the Blanchets. He continued to practice the restoration of old Flemish harpsichords, while introducing technical improvements. The transfer of the running of the Blanchet workshop to Taskin was therefore a natural transition, ensuring the continuation of Parisian craftsmanship, while building on it.
Pascal Taskin was born on 2 July 1723 in Theux, in the principality of Liège, and is undoubtedly the most famous member of the Taskin family. He is the son of a modest carpenter, who began his career in Paris, as an apprentice of François-Étienne Blanchet. In 1766, he was admitted as a master of the guild of keyboard instrument makers. He quickly distinguished himself by his ability to renovate and convert old harpsichords, as the Blanchets used to do. The Museum of Fine Arts in Boston keeps one such instrument, a harpsichord by Joseph Joannes Couchet made in Antwerp in 1680, and modified by François-Étienne Blanchet and Pascal Taskin, in Paris, in 1758 and 1781[1].
One of Pascal Joseph Taskin’s major innovations was the introduction of skin plectra, in his “buffalo harpsichords”, which softened the sound and brought a new expressive quality to the instrument.
This development helped to strengthen Taskin’s reputation, making him one of the most sought-after instrument makers at court. Taskin’s workshop, located on Rue de la Verrerie[1] in Paris, became a centre of innovation and production of high-quality harpsichords.
Taskin also contributed to the transition to the pianoforte. In 1788, he presented a prototype for a piano to the Academy of Sciences, which demonstrated his interest in innovation. In addition to his talents as a maker, Taskin was also an excellent businessman. He succeeded in retaining Blanchets’ prestigious clients while attracting new ones, such as members of the royal court and renowned musicians.
Upon his death in 1793, the workshop was taken over by his nephew, Pascal Joseph Taskin (II). The latter lived and worked with his uncle until 1777, before opening his own workshop in Versailles and taking over some of the responsibilities of maker to the court, before the position was entirely given to him in 1793. In addition to harpsichords, he also made pianos. Pascal Joseph Taskin (II)’s son, Henri-Joseph Taskin, pursued a career in music as a piano teacher[1] and was the son-in-law of the harpsichordist Armand-Louis Couperin (nephew of François Couperin).
The spinet made by Pascal Taskin in 1778 is a masterpiece of instrument making, in terms of its technical execution, aesthetic refinement and historical importance.
This instrument, built according to the traditional techniques inherited from the Blanchet family, represents the pinnacle of French craftsmanship in the making of jack keyboards on the eve of the French Revolution.
Taskin reprised the techniques for making spinets developed by the Blanchets, while making notable improvements. The mechanism of the instrument, although similar to that of harpsichords of the same period, is thus optimized to offer better responsiveness to the musician.
The 1778 spinet is built with high-quality materials, including precious woods such as walnut and ebony – making it robust and elegant. Its historical importance is not limited to its technical qualities. Like Blanchet’s instrument, Taskin’s spinet is a testament to the changing musical tastes of its time. At the end of the 18th century, music for plucked keyboards was becoming increasingly popular, and composers such as Joseph Haydn and Wolfgang Amadeus Mozart expanded its repertoire by composing for the instrument. The 1778 spinet, with its technical innovations, is part and parcel of this trend that sought greater musical sensitivity.
This spinet designed in Paris is distinguishable by its trapezoidal body with ribs curved towards the keyboard, mounted on tapered and fluted legs in the typical Louis XVI style, giving the instrument an elegant yet robust appearance. The instrument has a remarkable range of 62 notes (from E to f4), allowing it to be used to play modern pieces with the low E. Its authenticity is confirmed by several important elements. First of all, the inscription engraved behind the keys, in red capital letters, that reads: “FAIT PAR PASCAL TASKIN A PARIS 1788”, which confirms the maker and date of the instrument. In addition, the soundboard is marked with the monogram “PT 1778”, surrounded by a crown of flowers, which is further evidence it was made by the master maker. Another proof of authenticity is found on the E2 key, on which is branded the inscription “PASCAL TASKIN”, as well as the year “1778” and the number “I”, which are all typical of the branding used by the Taskin workshop to identify keys and components.
The label printed on the inside of the spine, on the back of the instrument, provides further irrefutable proof of its origin. It reads: “PASCAL TASKIN, Facteur de Clavessin & Garde des Instrumens de Musique du Roi, Eleve et Successeur de M. BLANCHET, rue de la Verrerie, vis-à-vis S. Merry. A PARIS.” This inscription not only confirms it was made by Taskin, but also his status as the official maker of the king’s musical instruments, and Blanchet’s heir to that title. The instrument also bears evidence of a restoration carried out by his nephew, Pascal Joseph Taskin (II), in 1795, in the handwritten inscription situated behind the knife: « remplumee et redrapee par Pascal Taskin a Versailles ce 12 aout 1795 ». This inscription bears witness to the longevity of the workshop and the care that was given to this exceptional instrument by the Taskin family.
The extremely refined decoration of the instrument suggests the highest provenance. Indeed, this spinet is one of the most ornate made by Pascal Taskin. In light of his title of maker to the king, it is possible that the instrument was made for a member of the Court.
One of the most interesting theories is based on the painting of the lid, which might symbolize the birth of the first child of Louis XVI and Marie-Antoinette, Marie-Thérèse, born on 19 December 1778, the year the spinet was made.
However, this theory does not hold under further scrutiny, despite the correspondence of the years. Firstly, because the painting was done later, on the original varnish, and not at the time of the spinet’s manufacture. Secondly, because the figure of the baby, judging by its attributes, looks more like a boy. And finally, because paintings relating to royal births mainly concerned boys, who were the only heirs to the throne.
The birth of Marie-Thérèse, while celebrated in the arts, did not give rise to as many paintings as that of her brother, the dauphin Louis-Joseph of France, first heir to the throne of France, who was born on 22 October 1781, a few years after the spinet’s manufacture.
This major historical event, which ensured the lineage of the legitimate branch of the House of Bourbon, therefore fits chronologically better with the painting on the spinet’s lid. An X-ray examination (by Yale University conservators) confirmed that there was nothing but varnish beneath the lid painting. The instrument thus originally had a varnished lid without any figurative representation, and was probably subsequently painted over with the celebration the birth of the dauphin. This theory is all the more probable due to Tasking being the maker to the king, which would point to a commission for a member in the monarch’s close circle, offered as a gift to his sovereign.
In addition to this remarkable lid painting, the instrument features elaborate decorations throughout, typical of the taste of the time. The basswood case is covered with a varnish of a slightly greenish ivory tone, outside as well as inside, and decorated with gold leaf motifs. Inside, meticulous decorations feature branches of roses and cornflowers, while the keyboard surround is embellished with garlands of flowers and musical trophies painted with great precision, in the style of painters such as Jean-Baptiste Huet or Henri Sallembier. These ornamental motifs are loaded with symbols typical of the decorations adorning keyboards. However, they stand out here for their abundance and extreme detail, betraying the hand of a confident painter, which supports the theory of a noble patron.
This instrument must have been particularly important since it was built at the same time as a twin example, now in the collections of Yale University. This other spinet, also made in 1778, has an animal landscape on the lid. We do not know whether, like the example in the Vichy Enchères sale of 9 November 2024, this painting was done on an earlier varnish ground. These twin spinets were brought together for several years in the collections of Yale University, as can still be seen today on the museum’s website. It was restored in 1996, to be put back in playable condition, by Messrs. Rutkowski and Robinette, curators of the musical instrument collections at Yale University, which gave them an opportunity compare our instrument and its twin. Their restoration report accompanies the instrument in the sale.
Alessandro Riva’s virginal, made around 1835 in Bergamo, is a rare and precious instrument that bears witness to the craftsmanship of this little-known maker and to the last days of jack keyboard instrument making.
Riva, whose known existence spans the period 1803 to 1868, was a respected instrument maker, and this virginal, at once simple in design and meticulously crafted, perfectly embodies his craftsmanship. It has a range of 54 notes (C/E-a3), and features a rectangular solid walnut body, mounted on four rectangular spindle legs that screw into blocks beneath the instrument, providing stability and elegance. The walnut wood used for the body and lid, as well as the fir for the back, attest to a selection of quality materials, typical of instruments of the period, and contribute to its rich acoustic resonance.
The keyboard, made of fir, is distinguished by its ebony-veneered steps and its sharps in stained fruitwood and veneered with bone – materials that were traditionally use, but became out of fashion at the time. In contrast, the dimensions of the keyboard are rather modern since the keys are the same size as those of a piano.
The internal mechanisms, such as the pearwood jacks and the maple tongues, demonstrate fine engineering, with steel springs and carefully calibrated hard leather beaks (3.4mm wide and 1.65mm thick). These elements reveal a simplicity of design combined with a precision of execution, typical of Riva’s work. Finally, it is worth noting that the instrument does not have a damper, which, as Christopher Clarke reminds us, echoes the aesthetics of the “pantaloons” pianos of the mid-18th century. Indeed, apart from with these models, keyboards all had dampers.
“The authenticity of the virginal is confirmed by the presence of a handwritten label, carefully inserted behind a thin original glass window. Although the current label replaced the original one, the available documentation and comparisons with other instruments made by Riva, in particular the one in the Grassi Museum in Leipzig, leave no doubt as to its authenticity.”
Christopher Clarke, Donzy le National, 16 septembre 2024
Nicolas Blanchet’s 1676 spinet, Pascal Taskin’s 1778 spinet and Alessandro Riva’s virginal, made around 1835, offer an exceptional overview of the evolution of plucked string keyboards over three centuries. These instruments bear witness to the evolution of manufacturing techniques and musical practices, while reflecting the social and cultural trends of their time. The 1676 spinet, attributed to Nicolas Blanchet, is the earliest known instrument by this maker, and crystalises the beginning of the prestigious Parisian harpsichord making. Its shape and size are in keeping with the example illustrated in Marin Mersenne’s Harmonicorum Instrumentorum of 1636, and its octave register, called “of 4 feet”, was common in early harpsichords. However, unlike harpsichords for which it was a register among others, here the instrument is entirely at the octave.
Pascal Taskin’s spinet of 1778, built about a century after Blanchet’s, marks the golden age of this same Parisian workshop. Taskin, an apprentice and successor of François-Étienne Blanchet (Nicolas’ grandson), perpetuated the tradition while introducing notable technical and visual improvements. This richly decorated spinet reflects the vogue for these instruments among the elite of the time. The label inside the instrument, which identifies Taskin as “Eleve & Successeur de M. BLANCHET”, and the repairs carried out in 1795 by Taskin’s nephew, underline the continuity of this line of makers. It was made alongside a twin instrument (preserved at Yale University) and attests to the popularity of octave spinets at the end of the 18th century.
Finally, the virginal by Alessandro Riva, made around 1835, illustrates another tradition – this time Italian – and turns the final page on the era of plucked string keyboards.
Indeed, Riva is the last maker to have worked in accordance with traditions of this craft. This virginal, although built in the 19th century, features elements reminiscent of the past, in particular with regard to the short octave range (C/E in the basses), or the assembly with thin iron and brass strings, without dampers. At a time when pianos were becoming increasingly large and elaborate, Riva’s virginals offered a more compact and discreet alternative, suitable for private interiors and domestic use.
Together, these three instruments illustrate the evolution of musical practices and the construction of plucked keyboards, in particular the transition from the splendour of 17th and 18th century spinets to the elegant sobriety of the final examples produced. They represent both technical milestones and cultural testimonies of the rich history of harpsichords, before they were superseded by the piano.